"A tous les visiteurs, si vous apportez avec vous votre mets favori, salé ou sucré, si vous savez chanter ou danser sans retenue avec la légèreté du vent printanier et de la rivière en automne,si vous n'affichez pas un air suffisant ou affligé,alors nous partagerons la plus grande joie"



Santoka




dimanche 19 juin 2011

Archives du 19 juin

Tous les textes de ce 19 juin proviennent d'un précédent blog qui sera prochainement supprimé. Je tenais à les conserver ici. Ils ont été écrit entre 2007 et 2010.

Je reprends maintenant à aujourd'hui :


*




Fête des Pères
après le coupe-papier
le marque-page








*









Fête des Pères -
elle me récite son poème
les mains dans le dos







*

Les Seins de Ko (haïbun de Bill Bilquin)

les seins de ko



pleine lune
l’ombre nette de mes seins
sur le futon


c’est par ces lignes que commence le best-seller d’akiko blanche-marine, un
livre racontant de façon presque clinique l’errance de ko, une eurasienne à la
recherche d’hypothétiques racines dans le japon natal de sa mère. un roman
court. cent trente pages à tout casser. un livre où les seules notes aériennes
émanent de haïkus disséminés çà et là. au hasard des lignes. au détour des
détours de l’héroïne. et puis ce premier haïku. première nuit à tokyo. première
peur. première insomnie. naturellement, lancelot est tombé immédiatement
amoureux de cette héroïne de papier. la pâleur de ses traits, sa peau diaphane,
et ses seins. oui, ses seins… ses seins si pointus. combien de bonbons n’a-t-il
pas suçotés en rêvant aux tétons mutins de ko? quel est leur goût? leur couleur
exacte? leur texture? il se remémore sans cesse cette scène de jamon jamon dans
laquelle penelope cruz se fait vertement gober les seins par un homme lui
soutenant qu’ils goûtent le jambon. les seins de ko
goûtent-ils la glace au thé vert? ou les gyozas? les seins de ko hantent les
nuits de lancelot. et les jours aussi. lancelot en est là. un peu perdu.
complètement éperdu. amoureux d’une héroïne de livre. à 28 ans. quelle
tristesse. je ne suis quand même pas le héros secondaire d’un film de lelouch se
répète-t-il sans cesse et sans se convaincre vraiment. et pourquoi pas? pourquoi
n’incarnerait-il pas le rôle de cet adulescent qui croit encore aux belles
histoires? par un phénomène très naturel de substitution, lancelot tombe
amoureux de l’auteur. les lignes qu’il a lues sont trop naturelles pour avoir
été complètement inventées. ce livre est une autobiographie, une tranche de vie,
un peu à la façon d’une sophie calle. ko ne peut être qu’akiko. l’aphérèse est
là. aguicheuse et irrépressible. la première flèche d’un jeu de piste que
lancelot se met en tête de suivre. ce serait son lost in translation à lui.
akiko a lancé un appel. et il y répond. bien entendu, akiko ne s’est
jamais montrée. pas la moindre interview. aucune photo. silence absolu du côté
de l’éditeur. banquise totale. ce petit mystère a évidemment contribué au succès
du bouquin. chaque journaliste y allant de sa propre interprétation. l’un
prétendant qu’elle s’était suicidée, et que ce livre correspondait à sa lettre
d’adieu, l’autre assurant qu’il s’agissait d’une écrivain déjà connue pour des
livres mièvres… mais aucune de ces élucubrations n’a incité akiko à sortir de
l’ombre nette de ses seins sur le futon. insomnie.


nuit froide à kyoto
mes tétons durcissent encore
au contact du lin


c’est en sueur que lancelot se réveille. ligne quatre. saint sulpice. une
station trop loin. il sort précipitamment de la rame. laissant les seins de ko
sur un siège. un attentat poétique non prémédité. pas grave. par habitude, il a
toujours trois exemplaires avec lui. par habitude. ou par obsession. quel est
cette étrange impression? tout le monde le regarde. horreur. lancelot bande. il
s’enfuit, longeant les murs obscènes. il s’enfonce dans un couloir sombre. à la
première librairie, il rentrera et rachètera un exemplaire pour en avoir trois
sur lui. il se demande s’il n’est pas le principal responsable du succès de ce
livre. un best-seller rien que grâce à lui. et le voilà encore conforté dans son
besoin de rencontrer akiko. elle ne peut que tomber amoureuse de lui. en
marchant au beau milieu de ses pensées, lancelot frôle la mort déguisée pour le
coup en peugeot 406 bleu marine et grosses moustaches. il se dirige vers
l’adresse de l’éditeur. celle qu’il a pu trouver
après plusieurs jours de recherches dans des registres à peines informatisés.
l’arbre à papier. quel nom, j’vous jure! après plusieurs jours d’essais
infructueux par téléphone – ça ne répond pas, pourquoi appeler ça un répondeur?
– il décide de se rendre en personne chez l’éditeur, bien décidé à leur
extorquer les précieuses informations. rue des canettes. numéro dix-sept. le
nombre de syllabes d’un haïku. par définition. numéro dix-sept, c’est un bar.
les caves saint germain. aux étages, gaz et appartements exigus au loyer
prohibitif. au numéro dix-neuf? le café six. trop de chiffres. le sixième.
quartier historique des éditeurs. et quartier hystérique des sorteurs. pas
d’éditeur ici? lancelot va boire. s’enfoncer un peu plus dans son délire. et
dans les seins de ko. un décolleté passe à portée de doigts. s’y agripper. que
cette cocagne pulmonaire m’apporte une bouffée d’air. lancelot tombe sous le
choc de la gifle. il tombe ausssi en sanglots. sa quête en berne. il
raconte son histoire. en n’omettant aucun détail. et sans en rajouter. la foule
l’écoute. d’abord par politesse. par gourmandise ensuite. la foule parisienne,
quand on ne lui demande pas son avis, elle aime les héros secondaires des films
de lelouch. fin de soirée. les seins au décolleté ont finalement capitulé. la
tête haute. jamais on ne m’a touché les seins comme ça lance une inconnue le
matin. j’ai eu un orgasme d’une effroyable lenteur. tu es lent comme le miel.
plutôt comme une cérémonie du thé répond lancelot. comme tu veux. bon, je file
bosser. tu n’as qu’à claquer la porte. je suppose qu’on ne se verra plus. mais
tu sais où me trouver. lancelot se rhabille. petit déj chez paul. il y croise
michel field et le salue comme s’il le connaissait. en payant l’addition, un
carton de bière glissé entre les billets. la personne que vous cherchez va
souvent au bistrot mazarin.


sa main chaude
épouse le galbe de mon sein
l’odeur du thé vert


bistrot mazarin. lancelot attend. à chaque fois que la porte d’entrée fait
entendre son grincement, son cœur se serre. il redresse timidement les yeux. un
ado. il se revoit quatorze années auparavant, perçant ses boutons dans la salle
de bains après s’être masturbé sur une photo sein nus de samantha fox, sans
doute un montage, tout bien réfléchi, ses cheveux un peu gras, ses lunettes trop
grandes, sa voix hésitant entre maya l’abeille et les gremlins, une seule chose
était sûre, la mode des mini shorts qui déployait les jolis stylos des jambes
des femmes. trois jours. trois jours à boire du thé. et à se retenir d’aller
pisser pour être sûr de ne pas la rater. il est si près du but. akiko, un
pseudonyme, on le lui avait confirmé dans sa nuit aux caves saint germain, vient
souvent ici. trois jours interminables à la fin desquels un serveur aux accents
bretons lui demande qui il attend. akiko. vous êtes sûr? vous allez être
surpris. demain soir. vingt heures vingt. lancelot
aurait aimé dix-sept heures, pour la symbolique. mais vingt heures vingt, cela
lui convient. parfaitement même. cette nuit-là ne sera pas hantée. calme comme
une porte en papier. la journée suivante semble plus longue. une longue douche.
rasé de près. repasser la chemise en lin col mao. acheter des amaryllis rouges.
les offrir à une dame âgée qui sort de la librairie dans laquelle lancelot
achète plutôt un moleskine, un stylo à plume et une encre poussière de lune
couleur lie de vin. attendre à nouveau. vingt heures vingt. et des poussières
d’éternité. peu avant vingt heures trente, un petit homme trapu arrive, fait la
bise au chef de salle. il s’approche de la table. bonsoir, je suis akiko.
lancelot ne comprend pas. c’est moi qui ai écrit le livre que vous tenez à la
main. vous n’êtes pas une femme? on ne peut rien vous cacher. l’homme est
plaisant. courtois. fin. mais c’est un homme. le monde de lancelot s’écroule.
mais je suis amoureux de vous. enfin, je l’étais. je
suis akiko, mais je ne suis pas ko. mais votre écriture est tellement celle
d’une femme. merci du compliment. vous êtes homo? non, je suis comme vous.
amoureux de ko. elle travaille un peu plus loin dans un bar à sushi. je ne sais
pas si c’est son nom et ce n’est certainement pas son histoire. mais il s’agit
assurément de ses seins. akiko, le pseudonyme, paie le repas et deux excellentes
bouteilles. adieux cordiaux. le lendemain, lancelot mange des sushis. ko est là.
devant lui. les seins insolents. regards. sourires. ko s’appelle coraline. et
elle aime beaucoup le livre que lit lancelot. la nuit sera lente. comme du miel
dans le thé. insomnie.


éjaculation
dans le prolongement de mes seins
le mont fuji

Julien Vocance

Julien Vocance - Cent visions de guerre

Voici quatre-vingt ans que chaque année, au mois de novembre, est célébrée la fin de ce qu’on a appelé la Grande Guerre, celle de 14-18. Ceux qui ont échappé aux massacres ont souvent des difficultés à raconter ce qu’ils ont vécu, l’horreur de cette existence pleine de morts, de souffrance et d’injustice étant difficilement imaginable pour nos contemporains. La terreur et le désespoir des tranchées, de la boue, du sang, sont toujours difficiles à raconter à ceux qui n’y étaient pas.
Et pourtant, un homme, un poète, a su transmettre, à travers ce qu’il voyait, ce qu’il vivait, l’absurdité de ces batailles où des millions de jeunes gens étaient envoyés à la mort comme du bétail. Par de rapides impressions écrites au moment où elles étaient vécues, Julien VOCANCE (1878-1954) nous a laissé son témoignage de la guerre de 14 dans un recueil intitulé "Cent visions de guerre" (une allusion au "Trente-six vues du Mont Fuji" du graveur d’estampes japonais Hokusaï). Utilisant avec efficacité la forme poétique du haïku, Julien VOCANCE a su adapter des techniques poétiques venue de l’autre côté du monde pour tenir, sous la mitraille et les bombes, un journal de guerre composé d’une succession de tercets qui racontent en visions brèves les trous d’obus, le sifflement des balles, les pauvres cadavres accrochés aux barbelés. Certains de ces tercets sont restés célèbres. Ils retracent, en de courts tableaux, d’intenses moments de cette guerre atroce.

Dans un trou du sol, la nuit
En face d’une armée immense
Deux hommes

*
La mort dans le coeur
L’épouvante dans les yeux
Ils se sont élancés de la tranchée

*
Ils ont des yeux luisants
De santé, de jeunesse, d’espoir
Ils ont des yeux en verre.

*
Malaise de toute la chair
Où, dans un instant, peut entrer
La mitraille proche.

*
Gris fer, gris plomb, gris cendré,
Gris dans les coeurs résignés :
Relève des tranchées.

*
Pour arriver jusqu’à ma peau
Les balles ne pourraient jamais
Se débrouiller dans mes lainages.

*
Dans sa flanelle
Ses ongles vont, picorant
Les petites bêtes.

*
Il a lu la lettre de l’écolière,
Il a bien regardé son nom,
Il a dit que ça n’était pas pour lui.

*
Dans les vertèbres
Du cheval mal enfoui
Mon pied fait : floche...

*
Une belle lueur !...
Les mains aux paupières
Pour se protéger.

*
Retenu par le poids du sac, à la renverse
Sur la pente gluante,
Il gigote, hanneton comique et pitoyable.

*
Pansements durcis,
Vêtements flétris,
Visages fermés.

*
Des croix de bois blanc
Surgissent du sol,
Chaque jour, ça et là.

*
Un trou d’obus
Dans son eau
A gardé tout le ciel

*
Fleur qui respirait la lumière,
Son oeil gît,
La gorge tranchée.

*
Au petit jour,
Ils avalent goulûment
La soupe froide.

*
Dans ses yeux déjà voilés
L’affreux souvenir a passé
De la femme et des petiots...

*
Mais le poète survit tout en conservant à jamais les blessures de cette guerre effroyable.
*
Je l’ai reçu dans la fesse
Toi dans l’oeil
Tu es un héros, moi guère

*
Echappé de la lutte sanglante,
Sous la lampe du soir
Me réfugier près de toi.

*
Guerriers farouches!
Leur coeur chavire
Devant un bobo de gosse.

*
Vieux briscard,
Aux champs retiré,
Mais que l’après-guerre lamine.

*
Il s’assit,
Genoux au menton
Dans une encognure de porte.

*
Cent visions de guerre est publié dans Le livre des Haï-kaï, poèmes de Julien Vocance (Joseph Seguin), Les Compagnons du Livre, 1983
http://www.terebess.hu/english/haiku/jvocance.html

Pâques (mars 2008)

*





le Père Noël

elle n’y croit déjà plus
- voyons les cloches




*



aube brumeuse ...
un couple enfouit ses œufs
multicolores




*



cloche rouillée
des enfants en pyjama
s’élancent




*



si vaste
le jardin où se cache
l’oeuf de Pâques




*



noisetier humide
un oeuf
de l’an dernier




*



au bout du fil
la fillette énumère
les chocolats récoltés




*



poule de Pâques
il ne te faut qu’une minute
pour perdre la tête




*



printemps
sous la pluie
quelque chose qui cloche




*



en sursis
dans l’herbe humide
la pâquerette




*



bébé

salle d’attente
plaisantant
tant qu’on peut


*

énorme
mon auriculaire
dans ta petite main


*

mon bébé
tout est petit
sauf ses yeux


*

mon bébé
tout fripé
comme un bourgeon


*

toute sa tête
dans la paume de ma main

- sourires


*

papa ... maman ...
la chambre silencieuse

- sourires


*

vers la mairie
dans l’air printanier
un prénom en tête


*

Absence

chambre vide
des rires de la fillette
l'écho lointain



***



son petit lit
peluches
immobiles



***
la ruelle
où nous jouions hier

déserte



***



elle emporte avec elle
son sac à dos
et son rire



***



retour de la gare
du ciel bleu
il n'a rien vu



***

à Aimé Césaire

*



carcasse de bois
toit de tôle brûlante :
"notre maison"



*


vieille cuisine
le luisant vernis
du cancrelat



*


Noël -
tout pour que rien
ne manque



*


Noël -
de pauvres cases riches
de victuailles



*


Noël -
des rues désertes pleines
de chants



*


boudin pimenté
et punch au lait
un poète s'attable



*


nuits noires -
pédale la vieille Singer
nuits blanches



*


toits de la rue Paille
que brunit l'embrun
et que rasent les vents



*


en lettres d'or
sur le verre de la lampe à huile :
MERCI

Hommage à Aimé Césaire

cette geôle noire
et ses barreaux couverts de neige
c'est la mienne


***



il navre les missionnaires
ils lui disent Jourdain
il chante Zambèze !



***



voum rooh oh !
danse nue de l'enfant noir
sous la lune pâle



***



canne à sucre
l'enfant perdu sur une route
mâche ses racines



***



"l'odeur du nègre
ça fait pousser la canne"
... poing serré



***



tranquille
un mouton broute
son ombre



***



combien de draps anglais
ou de viande sâlée
pour ce jeune nègre ?



***



banc du tramway
un nègre (grand comme un pongo)
se fait tout petit



***



jour de houle -
dans mon verre l'alcool
qui remue



***



au bout du petit matin
la pirogue noire
sur le sable blanc
glisse



***



au dos de la lettre
son adresse :
Quartier Abandonné



***



le vieux nègre
est mort
hurrah !*



***



ce soir dans la nuit
un vieux chien noir
aboie
aboie
aboie



***



dans le grand trou noir
d'un lac
il pêche



***



* citation : "Et au milieu de tout celà je dis hurrah ! mon grand-père meurt, je dis hurrah ! la vieille négritude progressivement se cadavérise"

Aimé Césaire, Cahier de retour au pays natal

vaches et lapins (mai 2008

soir d'automne -
j'irais bien donner des épluchures
à quelques lapins



***



couloirs du métro
je voudrais entendre
la cloche d'une vache !

L'hymne de nos campagnes 2 (mai 2008)

lune d'été
sur chacune des fleurs
du pommier





***




premiers rayons
surface luisante d'une pomme
dans l'herbe humide





***




après la tondeuse
sur la pelouse se dressent
les taupinières !





***




au pied
de la baie vitrée neuve
un oiseau mort





***




fière
de son mulot
la chatte





***




silence de juillet -
un petit couinement :
la chatte joue au mulot





***




parfaite
la courbe de l'hirondelle
jusqu'à son nid





***




imprévu :
des mûres
plein la capuche





***




au plus profond
des ronces de mûriers
les plus belles prises





***




une mûre
saigne
dans ma bouche





***




la mûre d'été
jamais on n'en mange
qu'une





***




dans la cuisine normande
le parfum lourd
des confitures





***




ballon perdu
dans l' exubérance
des hortensias humides





***




rosiers de maman
les footballeurs du dimanche
lèvent le pied





***




fraîcheur du soir -
serpente dans la pelouse
le tuyau d'arrosage





***




quand descend le soir
elle aussi, elle transpire
la pelouse en été





***

L'hymne de nos campagnes (mai 2008)

"mon mari ?
c'est l'oiseau sur la branche"
- retour du printemps



*


soleil de mai ~
roue contre roue conversent
poussette et fauteuil roulant



*


délicatement
il a ouvert le papier
du vieux camembert



*


sur le drap tendu
du cinéma de plein air*
la Guerre des Étoiles !



*


de temps à autres
une brise agite les clochettes
du muguet



*


il s'est promené
sur toute la longueur de cette crête
le bout de mon doigt



*


pluie fine -
parfois au fond des bambous
un grincement



*


elles reviennent
par milliers, partout
les fleurs des champs !



*

train (mai 2008)

Aller :



Midi
de plus en plus de soleil
de plus en plus de pins parasols



*


soleil du Midi -
les montagnes vertes
ont des tonsures rocheuses



*


plein sud !
de derrière une pinède jaillit
la Méditerranée !



*


La Provence
rose et verte
... et soudain bleue !



*


train
à grande vitesse
sur un tapis de fleurs des champs



*


comme s'avançant
vers les rails d'acier
les coquelicots



*


perdue
au milieu d'un pré
la grue



*




Retour :

prête
sur l'horloge de la gare
la mouette



*


ce sentier sinueux
entrevu par la fenêtre du train
où va-t-il ?



*


troncs noirs
roche à nue
la forêt panse ses plaies



*


à grande vitesse
la voie ferrée dans les
centranthes rouges





*


tombée du soir
mer d' un acier éclatant
des voiles immobiles






*


crépuscule
train et soleil
font une course



*


arrivée en gare
avant même l'arrêt
les files d'attente



*

Série cannoise ? (mai 2008)

*


ici aussi
le tapis rouge déroulé
- coquelicots !



*


belles plantes
sous la mitraille
du tourniquet d'arrosage



*


loin des starlettes -
photographie
d' une jardinière



*


montée des marches
l'une après l'autre
les fourmis



*


ça commence !
l'écran noir

les étoiles !



*

pluies de printemps

*



cité grise
dans son crachin gris
le rhododendron !






*


éclaircie -
doucement le frigo décongèle
la rue sèche








*


un dimanche soir
une page tourne
la chatte ouvre un oeil



*

Haiku de mai (2008)

*


resto japonais
elle engueule son mari
dans la langue de Bashô



*


voix claires
trois fillettes chantonnent
dans le soleil du matin



*


soir de mai
j'ai trouvé mon or
à la surface du fleuve



*


trottoir mouillé
un pigeon
clopin-clopant



*


pelouse de ville
le pigeon y a laissé
des plumes



*


silence -
l'air froid sur l'étang
résonne



*


soleil voilé -
la mer
pour elles toutes seules !



*


baignade de mai -
deux fillettes aux lèvres bleues
dans une serviette



*


vent de printemps
une mouette appliquée se pose
au milieu de la mer



*


combien de temps
l'ai-je regardé mâcher
ce lapin ?



*


saura-t-il un jour
où donc vont les canards
quand gèle le lac ?



*


bruine d'hiver
dans le jardin, en silence
la bicyclette rouille



*


dans la poussière
une mouche morte

frisson !



*

Pluies de mai (2008)

*


dimanche de pluie -
sur le toit de l'école d'en face
un ballon en mousse



*


seul
sur la berge humide
avec trois moucherons



*


fine pluie de mai
sous chaque pont enveloppé
d'une odeur de moisi



*


fine pluie de mai -
une heure à regarder
les petits ronds de l'eau



*


le long du fleuve
accompagné
de trois colverts



*


pluie fine sur les berges
de temps à autres
un couple sous un parapluie



*


sieste de mai ...
dans mon sac, le Bashô
me fait un bon oreiller



*


face au ciel
sous un vol de moucherons
sous un vol d' hirondelles



*


allongé sur un banc
à écouter passer
les joggeurs du soir



*


tiédeur du soir -
les boules de pétanque s'entrechoquent
une hirondelle s'envole



*


bavardages du soir -
les hommes sur leurs cacahuètes
les moineaux sur leurs miettes



*

Juin 2008

*


salle d'examen
plus loquace que moi
la mouche



*


papillon
battement de cil

envolé !



*


footing d'été -
des fleurs des champs
plein les yeux !



*


footing d'été -
les fleurs des champs
vives



*


footing d'été -
dans les herbes de l'étang
le rire des grenouilles



*


quelle chaleur !
dans la cave il retrouve
le ventilateur



*


quelle chaleur !
aujourd'hui la chatte laisse
filer les mouches



*


nuit d'été
dans son bol elle lappe
la lune pleine



*


seul sur le pont
inexorablement
le fleuve ...



*


tapis roulant
doucement le fleuve m'entraine
vers le couchant



*


mes larmes
ne sont pas amères
elles sont ... sâlées



*


nuit paisible
...
ne plus jamais parler.



*


tant de paroles inutiles
- brise dans les feuilles



*


vacarme
j'éteins la télévision.

écouter la nuit



*