"A tous les visiteurs, si vous apportez avec vous votre mets favori, salé ou sucré, si vous savez chanter ou danser sans retenue avec la légèreté du vent printanier et de la rivière en automne,si vous n'affichez pas un air suffisant ou affligé,alors nous partagerons la plus grande joie"



Santoka




lundi 27 juin 2011

Rue Jean Dolent

Rue Jean Dolent par un beau soir de printemps

alors que dans le ciel pu le chiffon du crépuscule

frotte l'étain d'une lune presque pleine

les fenêtres des cellules sont éclairées

au dernier étage de la prison de la Santé

et les cris des martinets attisent peut être

(mais je le pense sans être à leur place)

le douloureux attrait du dehors chez les prisonniers

et d'un façon sans doute bien plus lancinante

qu'une télévision puisque de le bouillie sonore

s'échappe aussi d'une autre cellule plus basse.


La télévision propose une autre évasion

que la rugueuse réalité des martinets

mais c'est difficile à dire, à écrire,

ce que font peut être leurs cris stridents

quand la lumière s'allume dans la cellule

et que dehors il fait encore jour,

ces appels de tous les coins de l'espace

quand la distance qui ne peut être comblée

pointe le mauvais côté de la lorgnette

sur le point le plus aigu de la prison.


Les martinets mais tout aussi bien j'imagine,

une portière qui claque dans la rue,


le pensent-ils : « quelqu'un qui rentre chez soi »,


ou bien « quelqu'un qui sort et qui s'en va »,


le pensent-ils ? - du fond de leur cellule ?


Une portière qui claque dans la rue

ou encore des bruits de voix sur le trottoir

ou peut être des cris d'enfants qui passent

(rue Jean Dolent, il y a une école maternelle).

Ce doit être terrible, le dehors qui soudain cogne.

(...)


Jacques Lèbre, rue Jean Dolent, in Po&sie 122-123

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