"A tous les visiteurs, si vous apportez avec vous votre mets favori, salé ou sucré, si vous savez chanter ou danser sans retenue avec la légèreté du vent printanier et de la rivière en automne,si vous n'affichez pas un air suffisant ou affligé,alors nous partagerons la plus grande joie"



Santoka




vendredi 24 juin 2011

la croix

« J'ai voulu vivre dans le pays où tu es, où les frontières sont abolies, mais toujours, je t'ai entendu ne rien me dire. Et j'ai alors préféré la mort à la vie. A cause de la vie. Comme si la mort était le pays où tu vivais, où tu ne mourrais plus. Comme si même la mort mourait. »


Sur la page 202 du Besoin de poème d'Yvon Le Men, un lecteur m'a précédé. Il a tracé devant ces lignes deux traits profonds au crayon de papier. Et, comme si cela ne suffisait pas à crier son cœur, il a placé, à la gauche de ces traits, une croix. Son exclamation muette. Sa confidence au livre. Sa résolution.

La croix disait « Je me suis arrêté là. J'ai souffert cette souffrance. Ce texte, c'est ma voix. Ces mots, ce sont mes larmes. Merci. »

Cette croix. Une déclaration de mort, gravée dans la chair du livre. Une promesse à son amour perdu. Comme autrefois peut être leurs cœurs entrelacés sur un tronc quelque part.

Cette croix. Une signature en bas de vie. La signature d'un vivant qui n' avait plus de mots. La signature d'un homme qui n'avait plus de nom.

Qu'est il advenu de ce lecteur, de cet amant, de de veuf, de ce pauvre cœur muet ? Et où est-il à présent ?


sans doute dans ce pays

au pays des frontières abolies

là où elle vit

et ne mourra plus.



Vincent Hoarau

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