Le jasmin de la nuit.
Alors s'ouvrent les fleurs de la nuit,
À l'heure où je songe aux êtres chers.
L'on voit voler près des viornes
Les papillons crépusculaires.
Enfin les voix criardes se sont tues :
Là-bas seulette une maison chuchote.
Sous des ailes dorment les nids,
Comme les yeux sous des paupières.
De tous les calices ouverts s'exhale
Un arôme de fraises empourprées.
Dans la salle brille une lampe.
L'herbe croît au-dessus des fosses.
Voici qu'une abeille attardée bourdonne,
Trouvant son alvéole déjà prise.
Court dans un pépiement d'étoiles.
Tout le temps que dure la nuit s'exhale
Cet arôme qui monte au gré du vent.
Dans l'escalier monte la lampe,
Brille à l'étage : elle s'éteint...
C'est l'aube : les pétales se referment,
Un peu fripés : cependant que s'apprête,
Dans le secret de l'urne humide,
Je ne sais quel grand bonheur neuf.Giovanni Pascoli (San Mauro di Romagna, 1855 – Bologne, 1912), Le jasmin de la nuit, Il gelsomino notturno in Poesie, tome I.
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